Mauvais trou.

Plus jeune et sous la signature du Flying Bum, j’avais entrepris d’écrire un livre avec un trou dans le milieu. Et ce trou devenait le centre du récit, forcément, puisqu’il fallait faire le tour du trou pour l’écrire. À cette époque je travaillais comme journalier dans le département de reliure d’une imprimerie commerciale et j’avais confectionné moi-même un petit livre carré d’une centaine de pages dont j’avais perforé le centre d’un trou de trois huitièmes de pouce autour duquel j’entrepris d’écrire ou de gribouiller. L’oeuvre a été placée dans mes archives en compagnie de plusieurs trucs à utilité différée* dans ma shed sur la 5ème avenue qui malheureusement embrasa le ciel de Rosemont par une belle nuit d’été.

*choses qu’on conserve dans l’espoir que leur utilité nous revienne en mémoire.

avertissement

Cette chronique, parce qu’elle traitera de choses qu’on insère dans d’autres choses, nous ramènera inévitablement au trou, à l’orifice, puisque dans le domaine des choses qu’on insére dans d’autres choses, le trou s’impose comme un grand et incontournable classique. De là l’avertissement.

Les gens trouvent toujours le moyen d’insérer des choses dans des endroits pas du tout destinés à cette fin. Des pieds dans la bouche, des clés dans les prises de courant, des oeufs dans le micro-ondes, des fèves dans le nez. Ceci constitue un problême majeur des temps modernes. Et avec tout l’internettage et le socioréseautage qui se déroulent aujourd’hui, les gens s’y donnent à coeur joie en insérant leur nez partout sauf aux places où ce serait d’une utilité optimale comme par exemple dans des choses reliées à l’élévation de l’esprit. À une certaine époque de ma vie, j’avoue avoir commis tous ces gestes questionnables (à l’exception de la fève dans le nez à laquelle je substituai un bout de papier plié en mille dans le creux de mon oreille). Et le pied dans la bouche brille de tous ses feux partout dans mon curriculum.

Les doigts constituent une grande part du problême. Ils semblent perpétuellement s’enfoncer dans les oreilles, les nez et même dans les tartes au sucre. Mais j’aimerais focuser ici davantage sur les orifices et les trous que sur les doigts comme tels (ceux pour qui les scrupules font obstacle à l’usage des mots trous et orifices, remplacez ces mots par ouvertures). Les orifices et les trous sont tellement cool parce que nous en avons tous besoin pour insérer des choses dans d’autres choses non seulement théoriquement mais aussi de façon pratico-pratique. Nous avons besoin d’insérer des wagons dans les tunnels, des cartes dans le guichet, des branchements dans des prises, des fils USB dans le téléphone, du bon manger dans’bouche . . . et dans certains cas nous avons besoin inversement de retirer des choses, de faire le vide, de diminuer la pression, d’évacuer des choses contenues quelque part (et ici je n’élabore pas).

L’acte d’insérer des choses est important mais potentiellement très dangereux quand les objets en question n’étaient pas destinés à être insérés aux dits endroits; en d’autre mots si l’insertion cause de la douleur, interrompt l’ordre naturel des choses ou nécessite une intervention médicale qui replacera chaque chose dans son contexte approprié (en harmonie avec l’ordre naturel des choses). À cette enseigne, les récits de salles d’urgence ou de belles-mères affolées abondent.

Nous ne pourrions que très péniblement survivre sans orifices corporels. Les orifices nous offrent des opportunités exceptionnelles de goûter et se nourrir, d’écouter du Vivaldi ou d’entendre arriver le facteur, de humer les parfums et de savoir quand la douce s’échappe et toutes sortes d’autres expériences digestives, ou d’autres encore, nuitamment amusantes et jouissives.

Wiiiiinnnn. . .Wiiiiinnnn. . .Wiiiiinnnn. . .Wiiinnnnnn. . .

(bruit d’alarme)

radio

Mais, hé, la nature humaine étant la nature humaine et les amants qui souffrent d’un type de distraction hypocrite sont légion, quelqu’un se devait d’inventer une application de dépistage précoce munie d’une alarme de mauvais orifice pour prévenir les insertions inappropriées. Quelqu’un avec un meilleur sens de l’entrepreneurship que moi devrait pousser le projet à fond et commercialiser l’application. Je ne retiendrai qu’un faible pourcentage des profits.

D’un autre côté si l’alarme à méchant trou avait existé, nous aurions dû vivre sans un chef d’oeuvre du ver d’oreille comme celui-ci:

Le trou.

Ou encore, pour mes lecteurs familiers avec la langue des conquérants, ce petit bijou de la chanson contemporaine:

Beans in my ear.

Définitivement, c’eût été une grande perte pour l’humanité.

Flying Bum

pieds-ailes

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