Une fois au Gigi : rencontre arrangée
Au Gigi Pub, le serveur, Juan-Carlo, nous installe sur la terrasse. Il nous apporte des chips de maïs et de la salsa, sans qu’on ne lui ait demandé quoi que ce soit. Nous sommes encerclés par des gens heureux. C’est stupide, des gens heureux quand on y pense. Après quelques rondes, nous réalisons que nous pourrions être heureux, nous aussi. On a tellement bu de sangria qu’on en a oublié de manger, et nous faisons l’amour – la moitié de nos vêtements encore accrochés à nos corps agités – dans l’édifice sommaire deux portes plus loin qui abrite un lave-auto de fortune, et l’une de mes espadrilles Adidas reste coincée dans la courroie d’un convoyeur. Je dois l’abandonner.
Une autre fois au Gigi : deux tourtereaux
Deux tourtereaux, nous rions, croustilles en main devant un bol de salsa et un pichet de sangria. Nous rentrons dans notre nouvel appartement et nous tentons tant bien que mal, éméchés, d’enterrer une espadrille Adidas orpheline dans la cour en arrière, pour la chance se dit-on.
Encore une fois au Gigi : coup de grisou
Comme ça, comme les fragiles éléments d’une ampoule explosent sans prévenir, noirceur-surprise, une chiennerie de maladie venue de nulle part quand ce n’est surtout pas le temps. Tu ne peux pas amener notre bébé fille à terme, et pour toi c’est tout ce qui comptait.
Je voulais juste que tu vives, et j’espère seulement que cela suffira.
Cette fois-là au Gigi : yogourt à la tragédie grecque
Au Gigi, tu demandes de la glace et un verre (pour le vinier en carton de blanc bon marché que tu traînes partout maintenant que tu as la sangria en sainte horreur). Il est 3h15 un mardi après-midi et tu es ronde comme un ballon rouge. Je suis rouge de honte et tu ne veux pas manger. Notre chienne, Charlie le chihuahua – qui a hérité du prénom de la fille que nous n’aurons jamais eue – est portée disparue.
Nous ne le savons pas encore, mais dans quelques jours, ta mère en visite, retrouvera Charlie sur sa route et ira la vendre à l’animalerie du coin. Elle pissait partout. La chienne pas ta mère.
Mais avant ceci, au dîner, après nous avoir débarrassé de ta boîte en carton vide, notre serveur favori, Juan-Carlo, nous avouera en soupirant profondément qu’il s’appelle Gilles.
Au Gigi : parfois cinq années passent sans s’arrêter
Dans mon téléphone portable, quelques noms de filles. Sans plus.
Ici au Gigi, un an aussi ça peut passer : seuls et ensemble
Je te quitte. Ensuite je reviens. Tu me quittes. Ensuite tu reviens. Supplice chinois.
Toujours au Gigi, un de ces quatre : cinq à sept
Nous nous rencontrons à 4h59 pile, à temps pour voir Juan-Carlo-Gilles (maintenant gérant-serveur) allumer le néon du cinq à sept.
Dehors sur la terrasse, nous sommes seuls. Nous ne buvons pas. On se regarde, à peine. Un an depuis la dernière fois qu’on s’est touchés, à peine.
On ne se raconte plus la première fois qu’on s’est vus au Gigi. Le lave-auto deux bâtisses plus loin est fermé, un sans-dessin de Verdun est mort coincé avec une fille dans la grande turbine. Pauvre fille, elle a survécu. Je ne sais pas pourquoi les histoires doivent toujours finir aussi mal mais apparemment c’est comme ça. Pas de chance. Après le cinq à sept, je retourne, seul, dans la cour derrière notre appartement vide.
À la brunante, je déterre le calvaire d’Adidas.
Flying Bum
As the world turns, comme ils disent. Y’a des minutes plus vites que d’autres, moins orphelines…
J’adore (moi aussi) les bulles de vie que tu fais remonter!
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Merci et bonne soirée Geneviève.
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Je trouve intéressant ces brèves autour d’un lieu avec différents personnages, à différents moments.
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Merci Marie-Josée et bonne journée.
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Le Gigi est le nouveau Centre du Monde, ce n’est plus la Gare de Perpignan de Dali 🙂
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Oh, j’ai mis une photo du célèbre Gigi de Paris mais celui qui m’a inspiré est un bien modeste Gigi de ville Saint-Michel (quartier Montréal) 😉
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raison de plus pour lui faire une place au soleil 😉
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bien fichu ! souvent.
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👌👌👌
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Et le coeur, quand il nous pince.
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